Forme née au XIXème siècle
qui n'a recourt ni à la rime ni à la strophe. Il utilise
l'image, le rythme et la musique des mots:
PARNY : Chanson II " Belle Nélahé...
"
BERTRAND : Les cinq doigts de la main
BERTRAND : Madame de Montbazon
BAUDELAIRE : Un cheval de race
RIMBAUD : Dévotion
CROS : La chanson de la plus belle femme
Le poème en prose naît officiellement
en 1842 avec la parution de Gaspard de la nuit d'Aloysius Bertrand.
Cependant, il a eu des précurseurs tels que Évariste Parny
(1753-1814) avec les Chansons madécasses (1787), Alphonse Rabbe
(1786-1829) avec l'Album d'un pessimiste (1835) et le poète allemand
Novalis (1772-1801) avec les Hymnes à la Nuit (1800, écrits
en vers et en prose).
Le poème en prose existe plus que jamais aujourd'hui, après
avoir connu un essor considérable à travers le monde à
partir des années soixantes.
Apparu en France, le poème en prose est resté longtemps
l'apanage des poètes français.
Ce n'est qu'au XXe siècle que sa pratique s'est répandue
peu à peu hors de France: en Europe de l'Est et de l'Ouest, en
Scandinavie, en ex-Union Soviétique, en Amérique du Nord
et du Sud et même au Japon.
Auteurs
et oeuvres.
Aloysius Bertrand (1807-1841), Gaspard
de la nuit.
Charles Baudelaire (1821-1867), Le Spleen de Paris.
Arthur Rimbaud (1854-1891), Illuminations.
Max Jacob (1876-1944), Le Cornet à dés.
Pierre Reverdy (1889-1960), Plupart du temps.
Francis Ponge (1899-1988), Le Parti pris des choses.
Jean Tardieu (1903), La Part de l'ombre.
Maurice Chapelan (1906), Amoralités familières.
René Char (1907-1988), Le Nu perdu.
Günter Eich, poète allemand (1907-1972), Rêves.
Robert Bly, poète américain, The Morning glory (1975).
Helga Novak (1935), poète allemand, Palisaden.
(Certains des recueils cités ne contiennent pas que des poèmes
en prose.)
Le poème en prose (comme le vers
romantique et, plus tard, le vers libre) est né d'une révolte
contre les règles contraignantes, tyranniques du poème
en vers classique.
En l'affranchissant des conventions de la métrique et de la prosodie,
le poème en prose a permis au poète d'explorer de nouvelles
terres langagières, hors des sentiers battus de la raison et
de la logique traditionnelle.
Le poète a découvert dans la prose de nouveaux rythmes,
de nouveaux moyens d'expression qui lui donnent la possibilité
de mettre en forme une vision du monde inédite, originale, en
accord avec la complexité de l'époque moderne.
Le rêve et le fantastique, grâce à la forme souple
et libre du poème en prose, prennent enfin une place importante
en poésie. Le poème en prose se définit essentiellement comme
un morceau de prose court et dense, travaillé et ciselé
comme un bijou, fermé sur lui-même (pas d'intrusions du
biographique) et produisant une forte impression esthétique.
Cette exigence relative autant à la forme qu'au but recherché
montre bien que la liberté du poème en prose ne correspond
pas à un laisser-aller esthétique.
Le poème en prose est la manifestation
d'un esprit d'individualisme qui refuse les principes d'un monde établi.
Sa principale fonction historique a été d'attirer l'attention
sur la crise des valeurs et des formes en littérature, mais aussi
dans la société en général; il a témoigné
(et témoigne encore) du désordre de l'époque moderne.
Le poète qui pratique ce genre littéraire (très
peu de poètes le pratiquent de manière exclusive), malgré
le rôle important qu'il joue, est considéré comme
un marginal. Il n'a pas beaucoup de lecteurs en raison du caractère
déconcertant de son art.
Origines.
Le poème en prose a été
rendu possible grâce à la déversification de la
poésie. La publication, au XVIIIe siècle, de nombreuses
traductions françaises de poèmes d'auteurs étrangers
avait fait prendre conscience d'une chose capitale: la rime et la mesure
ne sont pas tout dans un poème; celui-ci, même sans les
rimes et la mesure de la version originale, peut avoir de la valeur.
La prose avait réussi à intégrer des cadences et
des thèmes poétiques de chansons et de ballades: la poésie
pouvait donc exister hors des contraintes du vers. Le poème en
prose à ses débuts est proche par sa régularité
de la poésie en vers traditionnelle. Les poèmes d'Aloysius
Bertrand se présentent en effet sous la forme de couplets (en
général, il y en a six) de longueur à peu près
égale. Mais ce qui comptait pour les premiers auteurs de poème
en prose, c'était d'éviter de faire de lui un substitut,
un dérivé du poème en vers. Ils voulaient créer
un genre littéraire à part entière, jouissant d'une
complète autonomie.
Le poème en prose au XIXe siècle avait un caractère
métaphysique très marqué. Chez Baudelaire et surtout
chez Rimbaud, le poème en prose représentait un moyen
d'explorer l'univers infini du Moi et de se rapprocher d'une réalité
supérieure, à laquelle l'ancienne poésie ne pouvait
accéder, à cause de l'emprise de la raison et de la logique
traditionnelle.
Depuis le début du XXe siècle, le
poème en prose s'est beaucoup transformé et diversifié.
Il a accueilli l'humour et l'insolite (cf. Max Jacob) et s'est mis de
plus en plus à l'écoute des intimes et infimes manifestations
de la réalité concrète, prosaïque.
Cette tendance, que l'on trouvait
un peu déjà chez Baudelaire et Rimbaud, s'est accentuée
durant les cinquante dernières années (auteur important:
Francis Ponge).