Les formes poétiques françaises

 

La ballade

Origines.

- Le mot ballade vient de l'ancien provençal ballada, qui signifie "danse": la ballade était à l'origine, aux alentours de 1250, une chanson de danse; elle était inséparable de la musique. Longtemps polymorphe, elle s'est constituée dans une forme fixe pour la première fois avec Guillaume de Machaut au XIVe siècle: celui-ci a créé la ballade dite "primitive" avec trois strophes qui reprennent la structure métrique du huitain ABABBCCB utilisé à l'époque; le dernier vers était répété pour faire le refrain. La ballade est devenue un genre défini, avec une forme fixe, quand elle a cessé d'être chantée, pour être dite.

- la ballade apparaît vers le XVI° siècle. Très en faveur au siècle suivant, abandonnée de la Pléiade et des poètes du XVII° et du xviii) siècle, sauf Voiture, Sarrazin, La Fontaine, Mme Deshoulières et J.B. Rousseau, elle a de nouveau été cultivée au XIX° siècle. 

Elle comprend régulièrement trois couplets et un envoi, composés sur les mêmes rimes. Le plus souvent elle est écrite en vers de huit ou de dix syllabes, et les couplets comprennent autant de vers que les vers ont de syllabes; l'envoi reproduit la forme de la seconde moitié d'un couplet. 

Il en est d'irrégulières. C'est encore un poème à refrain, car le dernier vers du premier couplet revient comme dernier vers des deux autres et de l'envoi. Ce poème a suffisamment d'ampleur et de liberté pour que la poésie y puisse aisément trouver place, comme dans la célèbre Ballade des pendus de Villon:

Frères humains, qui après nous vivez,
N'ayez les cuers contre nous endurcis,
Car si pitié de nous povres avez
Dieu en aura de vous plus tost merci;
Vous nous voyez cy attachez, cinq, six;
Quant de la chair, que trop avons nourrie,
Elle est pièça dévorée et pourrie,
Et nous, les os, devenons cendre et pouldre.
De nostre mal personne ne s'en rie,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absouldre.

Se vous clamons frères, pas n'en devez
Avoir desdaing, quoyque fusmes occis
Par justice. Toutesfois, vous sçavez
Que tous hommes n'ont pas bon sens rassis.
Excusez-nous, puisque sommes transis,
Envers le Fils de la Vierge Marie.
Que sa grâce ne soit pour nous tarie,
Nous préservant de l'infernale fouldre;
Nous sommes mors, âme ne nous harie,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absouldre.

La pluye nous a débüez et lavez.
Et le soleil desséchiez et noircis.
Pies, corbeaulx, nous ont les yeux cavez,
Et arraché la barbe et les sourciz,
Jamais nul temps nous ne sommes assis;
Puis çà, puis là, comme le vent varie,
A son plaisir sans cesser nous charie,
Plus becquetez d'oyseaulx que dez à couldre
Ne soiez donc de nostre confrairie,
Mais priez Dieu que tous nous veuille absouldre,

Prince Jhesus, qui sur tous a maistrie,
Garde qu'Enfer n'ayt de nous seigneurie,
A luy n'ayons que faire ne que souldre;
Hommes, icy n'a point de mocquerie;
Mais priez Dieu que tous nous veuille absouldre.

Auteurs et oeuvres.

Guillaume de Machaut (v.1300-v.1377).
Jean Froissart (v.1337-v.1400).
Eustache Deschamps (v.1346-v.1406).
Christine de Pisan (v.1363-v.1430), Cent ballades.
Charles d'Orléans (1391-1465), Ballades et rondeaux.
François Villon (v.1431-v.1463), Testament.
Pierre Gringore (v.1475-v.1538).
Clément Marot (1496-1544), l'Adolescence clémentine.
Théodore de Banville (1823-1891), Trente-six ballades joyeuses.
Alphonse Piché (1917-, Québécois), Ballades de la petite extrace.

Le chant royal

C'est une sorte de développement de la ballade : il comprend cinq strophes de onze vers, plus un envoi de cinq, six ou sept vers, les stances et l'envoi étant terminés par le même vers.

La complainte

La complainte trouve son origine dans le planctus , récit religieux des Latins, et dans la chanson narrative des troubadours (XIe-XIIe siècles).
Poème de forme variable qui raconte les malheurs d'un personnage, historique ou fictif, ou du poète lui-même (voir Rutebeuf). Le texte évoque souvent un mort célèbre en relatant ses actions mémorables et ses bienfaits et en pleurant sa disparition; la complainte était proche, surtout au début, de l'oraison funèbre.
C'est un genre de la littérature populaire, pratiqué par nombre d'auteurs, la plupart anonymes.
Elle est destinée à être chantée ou récitée, d'où l'utilisation assez courante de couplets et de refrains. La présence de l'auditoire et, partant, de la communauté où vit le poète, est fréquemment suggérée dans le texte: par exemple, l'auteur s'adresse souvent à ses auditeurs au début de la complainte pour attirer leur attention.
La complainte peut parfois avoir un caractère satirique ou comique (la Complainte de Fualdès).
- À partir du XVIe siècle, la complainte se voit souvent intégrée à d'autres genres poétiques comme la consolation, la déploration et l'élégie. Au XIXe siècle, Jules Laforgue écrit des complaintes tout à fait personnelles en s'inspirant du caractère populaire et satirique de certaines vieilles complaintes.
En résumé, c'est un poème populaire de tonalité triste en principe construit sur deux rimes et à forme relativement libre. Dans la poésie moderne, souvent l'idée de mort y est mise en scène.

Auteurs et oeuvres.

Colin Muset (XIIIe siècle).
Rutebeuf (v.1230-v.1285), la Complainte Rutebeuf.
Alain Chartier (v.1385-v.1433), Complainte du pauvre commun
Jules Laforgue (1860-1887), Complaintes.

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Mis à jour le 28 mars, 2004

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