À celui de 14 à
celui de 39
Et puis de l'an 40
à celui du Chili à ceux de l'Algérie
Aux Juifs déracinés qui fuient la Palestine
A ces Palestiniens comme un arbre coupé
Vingt ans déjà
petit la mer toujours revient
De plus loin que là-bas les oiseaux blancs dévorent
Ce qu'il reste de suc à l'azur quotidien
Tu pars demain levant tes bras de sémaphore
Tu pars soumis défait boutonné de métal
Ta maman au poignet battant le pouls du diable
Tu as dit au revoir aux grèves syndicales
Aux copains au ciné aux filles charitables
Tu sais que l'homme pousse
et qu'il faut le couper
Quand il est encor vert dans le lit des délices
Comme on coupe les plombs de l'électricité
De peur que dans la nuit vos Soleils n'y complicent
La loi donnera des morts et
du café
-1979
-
*****
L'espoir
Dans le ventre des Espagnoles
Il y a des armes toutes prêtes toutes prêtes
Et qui attendent
Des oiseaux finlandais vêtus de habanera
Des Vikings aux couteaux tranchant la manzanilla
Des flamenches de Suède brunes comme la cendre
Des guitares désencordées et qui se pendent
Des amants exilés dans les cloches qui sonnent
La Mort qui se promène au bras de Barcelone
Des taureaux traversés qui traversent l'Histoire
Des soleils fatigués qui les regardent boire
Un Orient de misère à la jota engloutie
Les parfums de l'Islam crevant d'Andalousie
Des pavés de flamenco aux gestes anarchiques
Les rythmes du jazz-band pour les paralytiques
Les tams-tams de l'Afrique à portée de guitare
De l'eau fraîche et de l'ombre à jurer pour y croire
Une rue de Madrid avec des fleurs fanées
Un fusil de trente-six qui revient s'y mêler
Dans le ventre des Espagnoles
Il y a des armes toutes prêtes toutes prêtes
Et qui attendent
Un accord de guitare au moment où l'on passe
Un passeur langoureux avant le coup de grâce
La bouteille à la mer dans un drugstore indien
Un habit de lumière dans l'ombre du chagrin
La fureur pensionnée qui se croit dans la rue
Des chansons caraïbes qu'on a perdues de vue
Des cigales fuyant le bruit des castagnettes
Toutes les Amériques au fond d'une cassette
Exécutées à l'aube avec la stéréo
Le silence permis au-delà de Franco
Des ailes de moulin plantées sur les maisons
Don Quichotte qui passe à la télévision
Une chaîne en couleur pour avaler tout ça
Le sang avec la veine d'avoir la corrida
Et cent mille danseurs sur la place publique
Pour que Christophe Colomb découvre la Musique
Dans le ventre d'une Espagnole
Il y a l'Espoir qui se gonfle et qui gonfle
Et qui attend...
Et qui attend...
MANUEL DE FALLA
-1974-
*****
La
Chanson triste
Quand la peine bat sur
ta porte close,
Donne-lui du feu pour l'amour de Dieu !
Si ta flamme est morte et que tout repose,
Elle s'en ira je n'ai pas fait mieux.
Si ta flamme est morte et que tout repose,
Elle s'en ira je n'ai pas fait mieux.
Les fleurs de ma vie étaient roses blanches...
Je les ai données à tous mes amis
Pour les effeuiller entre quatre planches :
J'aurais bien mieux fait d'en fleurir ma vie.
Pour les effeuiller entre quatre planches :
J'aurais bien mieux fait d'en fleurir ma vie.
J'avais des habits taillés aux nuages,
J'avais des cheveux comme des drapeaux,
Et flottait au vent ma crinière sage ;
Lors j'ai tout perdu, restait que la peau.
Et flottait au vent ma crinière sage ;
Lors j'ai tout perdu, restait que la peau.
Je m'en suis allé sous dix pieds d'argile.
Coincé nez-à-nez par un ciel de bois.
Et disant mes vers à mes vers docile,
Qui m'auront rimé autrement que moi,
Et disant mes vers à mes vers docile,
Qui m'auront rimé autrement que moi,
Quand la peine bat sur ta porte close,
Donne-lui du feu pour l'amour de Dieu !
Et s'embrasera la dernière rose
Que j'irai cueillir entre deux adieux.
Et s'embrasera la dernière rose
Que j'irai cueillir entre deux adieux.